Il y a un mois quasi pile, découvre l’album à venir de Thierry Théolier, 2000 What The Fuck. M’introduis religieusement dans la géhenne avec sa prière corporate (« Corporate Prayer ») qui radicalise une absence de volonté de réussir. Ce n’est pas un aveu d’échec mais bien la formalisation d’une détermination de ne pas se compromettre dans une réussite standardisée, modélisée et portée aux nues par une foule déjà aveuglée.
TH prie donc, en dernier ressort et recours. Qui s’adresse encore aux Dieux dans ce monde où mythe, magie et spiritualité ont largement cédé leur place au magico-gigolo-trading-capitaliste, dans ce monde où les hommes ont choisi de prendre le risque de voler le feu pour gagner, consommer et s’accroître davantage et plus que de raison ? TH supplie Bouddha, Dieu, Krishna et Allah de l’épargner de la spirale infernale de ce succès-ci et fusille au passage quelques médias, « Libérafion », « IncRocks » et autres success-story agaçantes de The Artist à Astérix en passant par Katerine.
Ironie grinçante, au même moment, Le Point publie un numéro spécial « Nouveaux codes de la réussite » et promet de dévoiler ses secrets en explorant les domaines : vestimentaire, rhétorique, salarié, stylistique, créatif ainsi que les affres de la séduction. Miam ! La couverture paraît quant à elle tout droit sortie d’un esprit torturé et laissé paralysé dans les années 1980. On rit mais l’idée fait frémir tant elle paraît nier les réalités d’un pays, dit paralysé par la crise.
On retiendra entre autre qu’il faut : porter un jean comme [sic] Vladimir Poutine ; être beau, jeune, mince, grand, diplômé ; avoir de la gueule, un pénis, du culot et une jolie femme. Et pour s’améliorer on peut toujours jouir d’un relook, courir ou encore faire preuve de créativité. Ouf ! On n’est pas passé loin de la Rolex. Cool !
« Oh Dieux, faites que je ne réussisse pas ! »
Si TH prie, il en profite au passage pour dénoncer et écorcher quelques « suckers » et « suckeuses ».
Alors qu’il est nécessaire de descendre sur le quai au Terminus (« Terminus des minus »), de faire le point, d’affronter la réalité « en live », plus aucune rédemption n’est possible pour ces minus obligés à errer dans les limbes modernes. C’est une fin de partie 2.0 saturée de notes électroniquées, jeux-vidéoisées que TH compose. Après l’über connexion, le temps de l’amour et du bonheur USBêtifié, il faut prendre la route, errer, faute de pouvoir user d’un flingue indisponible – son distributeur étant en panne – et d’abréger ses souffrances. Ici où il n’y a même plus de lumière, quelque chose suit son cours mais paraît condamnée à une pixellisation neutralisée.
Pour ceux qui ne sont plus que la moitié d’eux-mêmes, rivés à leurs écrans, faute de pouvoir ou vouloir affronter la réalité - les contaminés atteints du syndrome de FOMO (Fear of Missing Out), peur de perdre le flux du tout médiatique et de passer à côté d’une information prétendument capitale - cette hyperconnexion creuse une béance inaliénable. Les engagements réels, vécus comme des contraintes, sont oubliés et mis à l’écart grâce à la « vie sociale totale » illusoirement affichée à l’écran. Pour ceux là et autres suckers, il est temps de prendre le pli de nouveaux horizons, de décoller sa tête de l’interface graphique, d’ouvrir le rideau numérique et d’appréhender la vie plus légèrement, moins connement, de façon moins standardisée, enfin de vivre en toute simplicité.
Les singles Corporate Prayer et Suckers sont d'ores et déjà disponibles sur Itunes en cliquant sur > ici-même < oui là
Album : sortie Septembre 2013 sur itunes etc...& CD
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