Dire c'est voir. À l'heure où la cheville fraîchement ouverte d'un joueur de football s'offre à la vue de tous, où la langue d'Emma Watson, feu Hermione Granger dans les films de la saga Harry Potter, sort et ressort inlassablement d'une bouche qui invite à une communication toute non-verbale, où des milliers d'images destinées à "en mettre plein la vue" et à "faire plein de vues" défilent sous nos yeux hagards, on a souhaité sécuriser ici le domaine des arts.
Alors il reste, fort heureusement, les mots pour passer entre les mailles des algorithmes du réseau.
Si Facebook était un pays, sa fréquentation le placerait au rang de troisième État le plus peuplé du monde.
Il est peut-être nécessaire de battre le rappel face à ses errances hardies.
En guise de tambour, ces quelques lignes d'Edgar Morin.
Nous n'avons pas la conscience d'une citoyenneté commune qui devrait faire de nous les citoyens de ce que j'appelle la "terre-patrie". [...] Les humains ont une identité commune, pas seulement le même code génétique, la même capacité cérébrale, mais les mêmes capacités d'émotion, de sympathie, d'amitié donc de haine. Nous avons également entre nous une communauté de destin.
Il faudrait imaginer pour ce pays, qui pourrait à bien des égards apparaître comme une forme de maison mère de cette terre-patrie dont parle Morin, des valeurs plus justes, où l'art ne subirait pas de rejet mathématique, où la publication d'un nu ne serait pas bêtement facturée d'une contredanse ou d'un avertissement.
Parce que nous le fréquentons en grand nombre, il serait sûrement de bon ton de ne pas accepter de laisser ici l'absurde réguler l'ordinaire.
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Photographie : Laure Albin Guillot, Étude de nu, 1939,
Bibliothèque nationale de France © Laure Albin Guillot / Roger-Viollet
Citation d'Egar Morin : “Au coeur de la crise mondiale” in La violence du monde, Jean Baudrillard, Edgar Morin - Paris, Le Félin / Institut du monde arabe, 2003
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